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Commentaire – Comme un éléphant dans un magasin de porcelaine

«Fantaisistes », « farfelus », « irréels », « surréalistes », « irresponsables », « abracadabrantesques », etc. Nombreux les adjectifs qu’on peut utiliser pour qualifier les propos du président Donald Trump sur Gaza et son plan pour une prise de contrôle américaine de l’enclave palestinienne afin de la transformer en « Côte d’Azur du Moyen-Orient ».

Comme un éléphant dans un magasin de porcelaine, pour ne pas dire tel un chien dans une jeu de quilles, le magnat de l’immobilier a jeté un pavé dans la mare d’un Proche-Orient déjà à feu et à sang, provoquant une onde de choc et d’émoi tous azimuts.

Maladresse pour certains, énième provocation pour d’autres, la déclaration du président étasunien rejoint une série d’annonces ayant déjà fait l’objet d’indignation, notamment chez les plus proches alliés de Washington. De sa proposition d’acheter le Groenland aux droits de douane infligés à ses deux voisins et les menaces adressées à l’Union européenne, en passant par l’épisode du Canal de Panama, le républicain a multiplier les vociférations et les hostilités sans queue ni tête.

Toutefois, avec sa décision de reporter d’un mois l’entrée en vigueur des « tarifs » (droits de douane) ciblant le Mexique et le Canada, la stratégie de Trump semble être celle d’un joueur de « poker menteur » adepte des coups de « bluff ». Entre ballons d’essai et effets d’annonce, le magnat de l’immobilier adopte une politique de la peur en poussant les dossiers brûlants à leur paroxysme pour obtenir le maximum sur la table des négociations. À l’image d’un négociant dans une position de force, l’occupant du bureau Ovale veut imposer le tempo des débats et la cadence en promettant son « Fire and Fury » (Feu et fureur) pour mettre son vis-à-vis sur la défensive, sans donner un plan pratique et une feuille de route claire pour exécuter ses sombres desseins.

Il faut dire que le 45e et 47e président américain rêve d’un destin à la William McKinley (25e président des États-Unis du 4 mars 1897 au 14 septembre 1901, NDLR) comme en témoigne son discours d’investiture.

En effet, le président McKinley est célèbre pour son « Mckinley Tariff » (une proposition visant à augmenter fortement les droits de douane), une rapide croissance économique sous sa présidence, sa défense du « Dingley Act » de 1897 (une loi destinée à protéger les industries américaines de la compétition étrangère), le « Gold Standard Act » (une loi votée en 1900, mettant fin au bimétallisme) et surtout pour la victoire rapide et décisive des États-Unis sous son commandement de la guerre hispano-américaine (25 avril – 12 août 1898). Ce triomphe militaire pousse l’Espagne à transférer le contrôle de ses territoires de Porto Rico, Guam et les Philippines aux États-Unis par le traité de Paris de 1898. Et dans la foulée, Cuba devient un protectorat américain.

Last but not least, sous la présidence de McKinley, la république d’Hawaï, alors indépendante, rejoint les USA en 1898 avec le statut de territoire. Voilà de quoi inspirer Trump et le motiver pour adopter une posture mckinleyenne.

Or, l’actuel locataire de la Maison-Blanche oublie que dans la politique internationale, il ne faut pas toujours prendre ses désirs pour des réalités car les ambitions et la folie des grandeurs peuvent buter contre la complexité de la realpolitik.

Si l’« éléphant » (symbole des Républicains) désigne naturellement la lourdeur et la maladresse, le « magasin de porcelaine » désigne la délicatesse d’une situation. Et il n’y a pas plus délicat que la question du conflit israélo-palestinien, notamment le sort de millions de Gazaouis, après les crimes génocidaires commis par l’entité sionistes avec les bombes livrées par Washington.

Nul doute que le président McKinley est l’idéal de Donald Trump. Or, ce dernier, qui a échappé à deux tentatives d’assassinat lors de sa campagne présidentielle, ne doit pas oublier la fin tragique de son idole assassiné par un anarchiste en septembre 1901. Car aussi puissant qu’on soit, le karma — le cycle des causes et des conséquences liées à l’existence des êtres sensibles —  peut avoir un effet boomerang, voire destructeur. Et les tessons de porcelaine fracassés par un éléphant peuvent blesser, voire porter préjudice à la bête aussi forte et importante qu’elle soit.

Après tout, qui sème le vent récolte la tempête.

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Un commentaire

  1. Montygo

    7 février 2025 à 21:44

    En ayant connu le personnage lors de sa première mandature présidentielle, on aurait dû enlever la porcelaine du magasin pour moins de dégâts durant la deuxième, qui soit dit en passant, ne fait que commencer, alors…

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